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Les 5 états de base - 1. La peur

Les 5 états ou émotions de base

 

Lorsque Jérôme, comédien de la troupe jurassienne Spirale, a expliqué à mes élèves qu'au théâtre, on travaillait sur les 5 états de base, je ne savais pas qu'on les nommait ainsi... La peur, la joie, la tristesse, la surprise et la colère sont en effet les 5 émotions que pouvaient ressentir les premiers hommes. Quand on les interroge, les adolescents pensent très rapidement à l'amour, que bien sûr les comédiens évincent aussitôt : l'amour est loin d'être une émotion de base, c'est un phénomène trop complexe pour cela...

 

J'ai voulu réfléchir à une représentation de ces émotions de base en commençant par la peur. J'avais beau chercher comment illustrer cet état, tout ce qui me venait à l'esprit, c'était les stéréotypes issus le plus souvent des bandes dessinées : couleur noire ; rayonnements de pointes ; mâchoires pourvues de longs crocs aiguisés ; yeux agrandis par la terreur, levés vers une menace qui vous domine ; tremblements suggérés par quelques traits de crayons gondolés autour d'une silhouette ; attitude prostrée : tête rentrée dans les épaules, position accroupie, bras levés pour protéger le visage...Bref ! Rien de bien personnel.

 

Je me suis alors mise à réfléchir à ce qui me faisait réellement peur... J'ai envisagé de ne plus avoir de toit, de ne plus avoir de salaire qui tombe tous les mois, de perdre un de mes proches... Bien entendu, tout cela me fait très peur mais... tous comptes faits, je pense être capable de faire face si une telle conjoncture se présente à moi... Je suis déjà passée par des épreuves dans cette vie, et bien qu'elles m'aient fait trembler, en effet, ou qu'elles m'aient imposé parfois des nuits blanches, j'ai pu les dépasser, rebondir et je m'en sens encore capable. C'est peut-être présomptueux de présenter les choses ainsi, mais c'est ce que je ressens au fond de moi.

 

J'en parlais à mon fils dans la voiture l'autre jour, et tout à coup, alors que je lui disais que je ne voyais vraiment pas ce qui pouvait me faire réellement peur aujourd'hui, une image s'est imposée à moi. Je ne me vois pas marcher au bord d'un gouffre en équilibre... Là, des souvenirs me sont revenus, par exemple, cette expérience avec des copains de Lyon qui avaient gentiment accepté de nous initier à la spéléologie... J'ai pu passer au-dessus de beaucoup d'obstacles, au propre comme au figuré ce jour-là, comme marcher le long d'une paroi humide et glissante haut au-dessus d'un lac glacial ( et magnifique !...) en me tenant à un seul filin d'acier vissé au mur par nos initiateurs, mais lorsqu'il s'est agi de descendre à la verticale le long d'une échelle ridiculement étroite, mouvante et arrosée généreusement par la rivière souterraine, mon cœur m'a lâchée. J'ai dit : Je reste là, je vous attends. Et rien n'aurait pu m'en faire démordre. Malgré tous les encouragements que j'ai reçus, les perspectives d'ennui alors que les autres allaient découvrir des salles fabuleuses que je ne verrais pas, je suis restée assise je ne sais combien de temps, sur un tout petit terre-plein au-dessus du vide, bien heureuse de ne pas me faire étouffer par le jet de flotte polaire, de ne pas sentir mes pieds glisser sans pouvoir trouver d'accroche sur le métal glissant de barreaux introuvables, de ne pas sentir mes bras lâcher à force de trembler pour tenter de me retenir aux montants-balançoires de ce fantôme d'échelle...

 

J'ai donc trouvé comment illustrer cette émotion pour moi : un fil mouvant, au-dessus d'un gouffre d'eau. Voilà ma vraie peur.

 

1. La peur.jpg

 

La peur, je pense que c'est savoir qu'on ne trouvera pas les ressources en soi, nécessaires pour dépasser une situation dangereuse.

 

Cela dit, je pense qu'on n'est pas obligé dans la vie d'affronter tous nos cauchemars, que les épreuves qui nous sont imposées restent à notre hauteur et qu'elles nous permettent de ne pas rester comme des larves à végéter et à nous ennuyer, qu'elles nous permettent surtout de nous dépasser...pour notre plus grande joie, au bout du compte, et notre plus grande sérénité.

 

29/08/13



29/08/2013
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